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retournons de quelques heures en arrière, et racontons bien chaque chose en son temps.

Deux hommes inconnus étaient débarqués durant la nuit à Batiscan. Ils venaient de loin. L’un des deux se rendit à pied à Deschambault, et l’autre traversa au sud, dans la chaloupe qui fait régulièrement, chaque jour, le trajet de Batiscan à St. Pierre Les-becquets, pour accommoder les voyageurs qui veulent prendre les bateaux de Montréal ou de Québec. Celui qui avait pris le chemin de Deschambault, pouvait compter quarante quatre ans et ne paraissait pas en avoir plus de trente six, tant il avait de gaieté dans les yeux, et tant riait toujours sa figure bronzée. Il était de taille moyenne, un peu sec, nerveux et vif. Il portait une longue barbe noire ; du reste, tous deux étaient riches de barbe et de cheveux. L’autre semblait porter sur ses puissantes épaules un fardeau de douleurs. Ce n’est pas à dire qu’il était courbé ; il se tenait droit, le front haut, l’œil ferme, et l’on se détournait pour le voir en murmurant : c’est un bel homme ! Il avait quarante deux ans, je crois. S’ils n’eussent pas été des hommes de fer, des marcheurs infatigables, ils