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poles diaphanes, des mers aux ondes métalliques et chatoyantes, des zones d’or ondulées comme des rivages, des franges capricieuses apparaissaient et disparaissaient soudain. Puis des voiles de gaze, puis des nuées de sang immobiles et lugubres, puis la neige éclatante, infinie qui reflétait toutes ces merveilles. La nuit était calme, le silence, si grand que l’on croyait entendre jusqu’au soupir des esprits. Le froid faisait éclater les arbres ; et toutes les pierres, tous les troncs, tous les rameaux s’étaient cristallisés sous le frimas ; et la lumière, en les éclairant, les embellissait d’une décoration fantastique. Tout à coup j’entendis un craquement de raquettes sur la neige durcie ; je regardai du côté d’où venait le bruit, et ne vis rien. Cependant le bruit ne cessait pas. Ô calme effrayant des nuits polaires, que tu es trompeur ! Ce ne fut que plusieurs heures après l’avoir entendu marcher que j’aperçus le chasseur. Il était vieux, boitait en marchant, avait la barbe blanche et les cheveux longs, mais rares. Il pleurait et ses larmes, gelées en sortant des paupières, couvraient ses joues d’une glace que les lueurs de la nuit faisaient resplendir. On eut dit qu’il portait