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moin ; il me répliqua : Tiens ! Je n’ai pas de secrets pour toi ; j’ai aimé, j’aime, et j’aimerai toujours. Celle que j’aime tu la connais, c’est Noémie ! Elle est la femme d’un autre, eh bien ! puisque de ce côté le bonheur m’est ravi, je n’estime plus les femmes que d’après leur dot, et je voudrais devenir veuf tous les ans pour me remarier toujours avec des filles avantageuses. — Si tu parlais sérieusement, réplique le témoin, j’irais avertir ta fiancée. — Je suis sérieux, répond Picounoc, je suis un maudit et le fils d’un maudit… donc il faut que je fasse mon œuvre.

Messieurs, ces paroles épouvantables sont le nœud gordien de la cause qui vous est soumise, et elles expliquent la noirceur de l’homme qui a ourdi ce drame, et la subtilité de ses moyens. C’est un maudit qui veut faire son œuvre, et Dieu sait qu’il l’a faite terrible !

Picounoc, marié et père de famille, nourrissait toujours dans son âme le feu de ses criminels désirs. S’il eut été un scélérat vulgaire, s’il n’eut pas été un homme maudit peut-être, il serait allé aveuglement où l’entraînaient ses désirs, et, comme la plupart des