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n’aurait pas mis, pour aller courir dans les jardins, le beau châle que je lui ai acheté dernièrement, observa mon mari. — Pour aller au rendez-vous, on ne se fait jamais trop belle, reprit Saint-Pierre. Mon mari, tout bouleversé, se rendit dans le jardin, il prit un rondin sur un tas de bois que Saint-Pierre lui avait montré, comme par hasard, un peu auparavant, et se cacha sous les arbres. L’obscurité se répandit. Alors il entendit venir quelqu’un, et vit deux personnes s’avancer vers la barrière. Quand elles furent entrées, il entendit Saint-Pierre s’écrier : je t’aime !… et la femme qui l’accompagnait poussa un soupir. Au bout d’un instant Saint-Pierre dit : Asseyons-nous ici, ma douce Noémie — comme s’il m’eut parlé — puis, il ajouta d’autres paroles encore… et embrassa sa femme… Il fit brûler une allumette exprès pour se faire voir. Alors mon mari qui se tenait tout près, un bâton à la main, aperçut une femme, la tête penchée sur l’épaule de Saint Pierre, et enveloppée presqu’entièrement dans un châle absolument pareil au mien. Il fut trompé par ce vêtement ; il crut que j’étais infidèle, et il voulut me tuer… et il aurait eu raison, si…