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— Aglaé Larose était ma femme bien-aimée, répondit le témoin, en poussant un soupir.

— Voulez-vous raconter à la Cour ce qui s’est passé dans la soirée du 24 septembre 1851, en rapport avec la cause actuelle.

— Il y a déjà longtemps, reprit Picounoc en relevant hypocritement un visage attristé, il y a déjà longtemps que cette soirée fatale est passée, mais je m’en souviendrai toujours. On m’avait dit que Letellier aimait ma femme ; elle-même m’avoua qu’il la poursuivait de ses assiduités, et la menaçait même de sa vengeance si elle demeurait toujours aussi insensible. J’avertis Letellier, en ami — car nous étions intimes — de respecter ma femme. Il me répliqua que ce qu’il avait dit à Aglaé n’était que du badinage. La chose en demeura là pendant quelque temps. Je surveillai les démarches et les regards de l’accusé, et je m’aperçus bien qu’il n’avait pas renoncé à ses coupables espérances. Mais j’étais sans inquiétude, car la vertu d’Aglaé m’était connue. Cependant Aglaé paraissait triste depuis quelques jours. À la remarque que je lui fis à ce sujet, elle se mit à pleurer, se jeta dans mes bras et me dit :