Page:LeMay - Le pèlerin de Sainte-Anne, Tome II, 1877.djvu/86

Cette page a été validée par deux contributeurs.

figures, et leurs âmes étaient ensoleillées. Avant de se séparer, ils échangèrent des gages de fidélité. L’ex-élève venait d’acheter un superbe mouchoir de soie rouge ; la jeune fille avait un mouchoir blanc garni d’une fine dentelle. Les deux foulards cachaient, dans leurs plis soyeux, quelques gouttes de parfums, et quand les jeunes gens défaisaient ces replis, les senteurs s’échappaient en bouffées enivrantes. L’ex-élève demanda à Emmélie son mouchoir en signe de constance. Emmélie n’osa pas refuser, mais, en badinant, elle s’empara du foulard de soie rouge et ne voulut plus s’en séparer. L’ex-élève partit, promettant de revenir encore dans une quinzaine de jours.

— Si la pluie continue, il fera noir cette nuit, dit le vieux Saint Pierre à Picounoc qui répond :

— Ce sera le moment de tenter la fortune. Il faut se hâter, car je pars demain pour aller voir ma mère. Quinze ans sans la voir, c’est long… pensez-y !

— Et ton père ?

— Mon père ?… Est-ce que je sais, moi, si j’ai un père ?