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Les jours s’écoulaient paisibles comme le beau fleuve qui dormait à la porte de la maison. Le repentir avait élevé l’âme de Geneviève à des hauteurs que n’atteignent point les miasmes du vice. Mais, avec le maître d’école, le trouble et la crainte étaient entrés dans la maison. Les menaces de Racette retentissaient continuellement aux oreilles des deux femmes, et sa colère et ses mensonges les remplissaient de mépris et de terreur. Geneviève était devenue triste et n’osait guère sortir. La nuit, des rêves pénibles troublaient son sommeil, et quand s’ouvraient ses paupières, elle croyait voir le monstre s’avancer dans les ténèbres à pas lents vers sa couche pudique. Elle essaya de chasser comme des folies ces pensées et ces craintes. Ce fut en vain. Pauvre Geneviève, tu peux redouter les desseins pervers de ton ennemi ! Il nourrit des projets de vengeance ! Il n’a pas oublié ses premières amours, et ta vertu l’aiguillonne ! Il n’a pas oublié tes paroles courageuses et ton noble mépris, et la haine, non moins que l’amour, tourmente son cœur. Il te retrouvera : il l’a juré. Il soustraira l’enfant à ta garde sainte : il l’a juré. Il ne se repose plus ; il jouit d’avance de son triomphe