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muet. Il y eut partout un soupir de soulagement : la société gardait dans son sein un scélérat de moins. Elle se trouvait plus à l’aise. On ne soupçonne pas la justice. Comme la femme de César, elle ne doit pas être souillée par l’ombre d’un soupçon ! À l’abri de son immense égide, cette femme noble et sévère, cette vierge froide et rigoureuse, la justice, se rend coupable cependant de plus d’un amoureux larcin. Mais jetons le voile.

Eusèbe Asselin ne trouvait pas avoir payé trop cher la condamnation de son pupille, et sa femme n’était pas loin de partager son opinion. Le mutisme de Djos n’était plus un secret pour eux. Racette avait appris, des gens de chantier, la terrible punition dont ce garçon blasphémateur avait été frappé. Il l’avait fait connaître, de suite, à son beau-frère, qui se garda bien d’en parler à d’autres qu’à sa femme. Le secret fut bien caché dans la famille. La première fois qu’Eusèbe rencontra Bélanger après le procès, il lui dit :

— Eh bien ! avais-je tort de chasser ce garçon-là ?… Mon pupille ! mon pupille ! lui, l’enfant de ma sœur !… Ah ! je le savais bien… On ne se joue pas de moi facilement…