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— Comment les amis de Québec vous appelaient-ils donc ? Je ne m’en souviens plus.

— Bah ! vous n’osez pas dire : Picounoc ; allons donc ! est-ce que j’ai du respect humain, moi ? Je m’appelle Picounoc depuis quinze ans, et je m’appellerai ainsi jusqu’à demain. Demain, je reprends mon premier nom ; je me range, et je n’ai pas l’intention de retourner dans les chantiers.

Ce nom provoqua le rire. Et l’on entendit une dizaine de voix demi-étonnées qui murmuraient : Picounoc ! comme si les arbres de la braierie eussent parlé.

Tout à coup s’élève, de l’autre côté du ruisseau, sur la côte chevelue, un chant d’une indicible mélancolie. On prête l’oreille ; Qui peut chanter ainsi ? se demande-t-on.

— C’est une chanson nouvelle ! L’air en est triste !

— Elle ne chante pas mal cette fille.

C’est, en effet, une fille qui jette au vent le dolent refrain, et sa voix tremble en chantant. Elle dit :