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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

car il pleut… Ses pieds mal chaussés se déchirent sur les rameaux secs et noueux dont le sol est jonché… Sa poitrine est tout haletante. Elle recommence à pleurer. Elle veut revenir sur ses pas, et se perd davantage. La nuit descend sur les bois. Les rameaux prennent des formes effrayantes. Les bouleaux, dans leur écorce blanche, ressemblent à des fantômes qui traînent leurs linceuls ; la pluie fait crépiter les feuilles, et l’enfant croit que les oiseaux font claquer leur bec, et veulent la mordre. Elle s’accroche aux épines et déchire sa robe, dont les lambeaux restent là comme des flocons de laine arrachés aux agneaux. Elle se heurte aux arbres morts que le temps a renversés, et tombe sur la mousse spongieuse ou dans les flaques d’eau. Elle s’imagine que les ours, ou les loups s’élancent sur ses pas pour la dévorer. Ce sont les hurlements des bêtes féroces : qu’elle entend, dans les longs soupirs des ormes qui se bercent au vent. Elle comprend son nom, et pense que ce sont les sorcières qui l’appellent pour l’enchanter avec leur baguette. Elle se sauve toujours ! Ô la pauvre enfant, comme elle souffre ! Comme ses pieds mignons, comme ses mains délicates, comme ses joues pâles sont en sang !… Elle