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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

le vent qui souffle de l’ouest, et le cap diamant qui ferme le fleuve à quelque distance en amont. Il espère, sans doute, voir quelque chose arriver sur les ailes de la brise ou sortir du promontoire escarpé. Une voile de lin paraît-elle en se balançant comme une aile d’oiseau, il se sert de ses mains fermées en tube, comme d’une longue vue, pour mieux la voir et la reconnaître. Puis il reprend sa posture nonchalante. De temps en temps aussi, il se tourne vers la place du marché toujours déserte, et un air de mécontentement passe sur son visage plein de rousseur. La mer est basse et les quais sont hauts.

Des gamins, les pieds nus, courent sur la grève vaseuse du Cul-de-Sac, à l’endroit même où s’élève aujourd’hui la halle Champlain, ce monument insignifiant qui a peut-être fait la fortune d’un homme ; mais qui ne fait pas à coup sûr, beaucoup d’honneur à notre bonne vieille cité. Des canots, des chaloupes, des bateaux de toutes sortes gisent là, pèle-mèle comme les arbres abattus gisent dans la forêt.

Deux hommes vêtus de toile grise et coiffés de chapeaux de paille, poussent à l’eau une embarcation légère, sautent dedans, prennent