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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

Lorsque Eusèbe Asselin se maria, il y avait environ huit mois qu’il était tuteur des enfants de son beau-frère. Il fit produire abondamment la terre de ses pupilles, empocha passablement d’argent et maltraita les innocentes victimes que le sort avait jetées entre ses mains.

Cependant la petite Marie-Louise était jolie malgré sa pâleur et son air souffreteux. Joseph commençait à s’endurcir à la douleur et à chercher, par de petites malices, à se venger de son oncle.

Il fit sa première communion. Il n’en fut ni meilleur, ni plus mauvais. Eusèbe eut une progéniture. Sa haine des enfants de son beau-frère augmenta en proportion de l’amour qu’il avait pour les siens. Madame Eusèbe surtout, se montrait implacable. Les femmes sont plus ingénieuses que nous à faire le mal comme à faire le bien. Elle aimait sa race, léchait et caressait ses petits, comme une tigresse, en montrant les dents aux autres. Jamais un baiser, jamais une douce parole pour l’orpheline ! L’orpheline ! elle couche comme son petit frère sur la paille froide, dans une chambre sans feu, recouverte d’un seul drap de toile, en plein cœur d’hiver, pendant que