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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

XXIX.

SOUVENIRS.


Le soleil a jauni les moissons. Les épis se balancent au souffle du vent, et un murmure s’élève au-dessus des champs féconds. Les moissonneurs, armés de leurs faucilles, une main protégée par la mitaine de cuir rouge, sont penchés sur la glèbe. Ils saisissent de la main gauche, l’une après l’autre, plusieurs poignées de grain qu’ils coupent de la droite, et se relèvent à intervalles réguliers, pour étendre, sur le sol, le grain qui doit javeler.

Le champ d’Asselin et celui de Bélanger ne sont pas éloignés l’un de l’autre. Noémie se plaît à voir tomber sous sa faucille la paille dorée. Elle fredonne souvent comme la fauvette, et sa voix est agréable aux moissonneurs. Les oiseaux répondent à ses refrains et voltigent autour d’elle, sur les clôtures et les cénelliers. Sa voix fait rêver. Elle le sait bien, car chaque fois qu’elle chante, le muet qui travaille dans le clos voisin, laisse reposer