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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

un suc vénéneux, et l’arbre avait porté des fruits amers, des fruits de mort.

— Malheur ! oh ! mille fois malheur ! pensait l’infortuné jeune homme, à ceux qui m’ont détourné de la voie droite où je devais marcher, et qui m’ont rendu un objet de honte et de mépris à mes propres yeux ! Mais je me relèverai ! Comme l’enfant prodigue, j’irai vers mon père !

Il entendait toujours les vœux criminels de son oncle, souhaitant que l’orphelin ne revint jamais ; l’histoire de la petite Marie-Louise égarée dans le bois, fut un éclair qui lui montra la vérité. Elle aussi la pauvre enfant était de trop dans le monde ! Elle aussi était toujours persécutée. Elle n’avait pas sa place au soleil… Son destin était écrit en lettres de sang. Sa vie devait se cacher sous un linceul. Plus de doute, l’enfant qu’il a sauvée est sa sœur, la petite Marie-Louise. Cet entrainement irrésistible qui le poussait vers elle, c’était l’inspiration du Seigneur : cette voix puissante qui l’invitait à protéger de son bras et de son amour, cette frêle créature exposée à la mort, ce n’était pas la seule voix de la charité, c’était la voix sainte et mystérieuse du sang.