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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

les plantes verdissantes et les fleurs épanouies… Viens, ô ma bien-aimée ! L’autel est prêt : les liens de l’hymen sont ici. Je couronnerai ton front de marguerites et de bouton d’or…

La jeune fille est captivée par cette voix suave et menteuse. Elle se sent entraînée vers cet homme qui lui tend les bras. Elle terme les yeux et fait un pas vers le précipice. Le sable mouvant se met à descendre avec un murmure sinistre. Geneviève regarde. Elle voit, comme un flot infini qui s’abaisse jusqu’au fond des océans, le flanc de la côte descendre vers l’abîme. Elle a peur et veut remonter.

— Descends ! descends ! dit la voix de l’amant.

Mais ce n’est plus l’accent de d’amour, c’est l’accent de l’orgueil triomphant. L’homme est devenu monstre, et ses yeux brillent comme deux tisons ardents dans sa tête noire et velue, et ses doigts sont armés de griffes acérées qui déchirent le sable pour le faire tomber plus vite. Geneviève essaie de crier : le son meurt dans son gosier aride. Elle fait un effort suprême pour remonter : ses pieds pressent le sable plus rapidement, le murmure grandit et la chute s’accélère. Les hurlements du torrent aug-