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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

de l’Oiseau de proie, portant dans ses robustes bras la petite Marie-Louise. L’obscurité était profonde. Il marchait au milieu de la rue, connaissant le danger qu’il y avait à passer sur le trottoir inégal, vermoulu et souvent interrompu trop brusquement. L’enfant semblait mieux. C’était peut-être la fraîcheur de la nuit qui la ranimait. Le muet avait résolu de la confier à une famille qu’il connaissait bien, et dans laquelle il était demeuré comme domestique pendant plusieurs mois. Il savait que cette famille aurait pitié de la petite infortunée, et la rendrait à ses parents s’il ne trouvait pas moyen, lui, de la soustraire pour toujours à ceux qui la maltraitaient. Quand il passa vis-à-vis l’auberge de la mère Labourique, il aperçut, à travers les fentes des vieux contre-vents, une chandelle fumeuse sur le comptoir. Il s’arrêta, jeta un coup d’œil indiscret dans la maison, et vit trois hommes qui causaient en fumant, assis à la table, près du mur.

L’un des trois hommes tournait le dos à la porte : il ne put le reconnaître ; les deux autres se montraient de face ; mais il ne les reconnut pas davantage. Il vit seulement que l’un était jeune et l’autre, vieux. Il y avait