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l’affaire sougraine

On retrouvait d’anciennes connaissances, on en formait de nouvelles ; la conversation s’allumait comme un feu de broussailles, et le murmure des fraîches voix de femmes, le parler sonore des hommes, les frémissements de la soie, le bruissement des pieds sur les tapis, tout cela formait un bruit étrange et gai qui remplissait la maison et grisait tout le monde.

Léontine se montrait fort aimable. Elle avait une bonne parole, un sourire gracieux pour chacun des invités. Cependant elle semblait un peu inquiète, un peu mal à l’aise, et ses grands yeux noirs revenaient toujours se fixer vers la porte grande ouverte. Elle attendait quelqu’un. Et celui qu’elle appelait de tout son cœur ne venait point. Elle perdait toute sa gaieté et ne répondait plus que par monosyllabes à ceux qui lui adressaient la parole. Elle ne se contraignait pas longtemps. Avec son caractère vif, bouillant, un peu fantasque, comme disait le père Duplessis, elle ne pouvait pas feindre.

— Vos parents font vraiment bien les honneurs de leur maison, lui dit le jeune ministre, qui venait de s’asseoir auprès d’elle, aussi, comme tout le monde se livre à la joie ; vous seule semblez un peu ennuyée : n’aimez-vous donc pas ces fêtes.