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l’affaire sougraine

plain, à 150 pieds au-dessous de l’imprenable citadelle. La fanfare, sous la direction de Vézina, l’habile chef d’orchestre, jetait au ciel, ses éclats sonores qui se répercutaient sur les rochers voisins ; le fleuve dormait dans son lit profond ; les navires immobiles avec leurs grands mâts garnis de cordages, ressemblaient à une forêt dépouillée par l’hiver. Le bruit continu des camions, des charrettes des wagons, qui serpentaient dans les rues étroites de la basse-ville, montait comme un grondement de tonnerre vers les calmes allées des remparts. Les hommes d’affaire, les flâneurs les étudiants, les dames de l’aristocratie, les demoiselles, les bonnes d’enfants, les gamins, les désœuvrés, les curieux, les employés du gouvernement, les chercheurs d’aventures ou de distractions, les avocats en quête de paradoxe, les médecins fuyant les remords, les notaires placides, les ouvriers de tout métier, les hommes politiques de toutes couleurs, les chercheurs de place de toute sorte, tout ce monde allait, venait, se croisait, se mêlait, se dégageait pour s’embarrasser encore, comme une populeuse fourmilière qui s’ébat au soleil sur le sable doré d’un jardin. Un grondement sourd s’élevait de là, qui se taisait quand les cors et les flutes, les clarinettes et les trombones recommençaient leurs accords.