Page:LeMay - L'affaire Sougraine, 1884.djvu/391

Cette page a été validée par deux contributeurs.
393
l’affaire sougraine

Un air de souffrance tempérait l’énergie de sa figure et lui donnait un charme nouveau. On savait comment il avait été blessé dans une partie de chasse, quelles souffrances il avait endurées, comme la mort était venue près de l’emporter. Depuis quelques jours seulement il pouvait sortir ; la plaie était cicatrisée. C’est lui qui dans un accès de fièvre, avait innocemment et sans malice, trahi son frère l’Abénaqui, un sauvage comme lui. Il le regrettait sans doute… comme l’on peut regretter une faute dont l’on n’est nullement responsable. S’il n’eut point eu cette fièvre, l’accusé serait encore libre et heureux. Voilà ce que peut faire une parole même inconsciente. Ah ! si la partie de chasse n’avait pas eu lieu !… Mais c’était le notaire, c’était Sougraine, c’était madame D’Aucheron qui l’avaient imaginée, cette malheureuse partie de chasse… Ainsi souvent les projets des méchants tournent contre eux.

La Longue chevelure parlait bien. Sa voix nette et ferme était l’écho d’une âme droite. On sentait que cette âme n’avait rien à cacher, et que cette parole n’avait rien à taire. On se plaisait à l’entendre, cet homme demi-sauvage.

Il raconta sa première rencontre avec l’accusé ;