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l’affaire sougraine

Anges. Il paraissait accablé de tristesse autant que de fatigue, et le soir, quand le silence envahissait la forêt et que tout se confondait dans un océan de ténèbres, il entrait dans une cabane de bûcheron, abandonnée depuis longtemps, et là, s’endormait sur un lit de branches. Il avait épuisé sa provision de poudre et de plomb, et sa carabine, fidèle, amie des anciens jours, lui devenait inutile.

Quelques jeunes gens qui venaient de couper des billots vers le haut de la rivière, remarquèrent des traces de raquettes et se dirent entre eux qu’il devait y avoir un trappeur en ces endroits. Ils entrèrent dans la cabane pour y passer la nuit, car il se faisait tard, déjà. Ils ne furent pas surpris d’y trouver un chasseur. C’est l’habitude de ceux qui errent dans les bois, en hiver, de chercher un refuge dans les chantiers.

Sougraine, — car le chasseur c’était lui — réveillé en sursaut par le bruit que firent en entrant les bûcherons, s’élança vers la porte pour s’échapper.

— Eh ! l’ami, dit l’un des survenants, vous êtes bien peureux… nous ne sommes pas des ours.

— Un sauvage ! remarqua quelqu’un de la bande.