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l’affaire sougraine

— Un sauvage qui a tué sa femme et enlevé une jeune fille, il y a vingt ans.

— Et il est revenu ? pourquoi ?

— Pour se faire pendre, je suppose…

— Comment sais-tu cela ?

— C’est lui, paraît-il, qui a, dans une partie de chasse, envoyé une balle à ce beau sioux, la Longue chevelure… sous prétexte de tuer un caribou.

— C’est assez singulier, cela. Est-il arrêté ?

— Je ne crois pas. On le cherche.

Pendant ce dialogue Sougraine éprouva toutes les angoisses par lesquelles un homme peut passer. Des sueurs froides lui coulaient des tempes sur les joues et ses dents claquaient de frayeur.

La fille qui servait au comptoir ouvrait la bouche pour dire :

— Je crois que c’est lui qui est assis là-bas, à cette table, mais un sentiment de pitié l’arrêta.

— Il y a vingt ans, pensa-t-elle… Mon Dieu, il doit avoir expié suffisamment sa faute… qu’il s’échappe s’il le peut.