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l’affaire sougraine

Devant la vitrine de Glover il y avait un curieux, un homme âgé de plus de cinquante ans, pas gros, pas grand, cuivré, sans barbe, le blanc de l’œil un peu jaune et la bouche large fendue. Il portait un capot de couvertes avec une raie noire dans le bas, une ceinture fléchée, des mitaines de caribou, un casque de chat sauvage.

— C’est un indien, dit Léontine à sa mère. Il y en a plusieurs en ville en ce moment-ci.

Madame D’Aucheron s’arrêta près de l’étranger lui jeta un regard distrait et se mit à examiner les articles de fantaisie étalés derrière les glaces brillantes. À chaque nouvel objet qu’apercevait sa convoitise, elle poussait un cri d’admiration.

— Que ce fichu est beau ! c’est de la dentelle de vrai fil — Ah ! ces mouchoirs, quelle fine broderie !… Regarde donc ces gants !… Quelles mains élégantes ils doivent faire !… Il n’y a personne comme ces Anglais pour savoir acheter.

— Et vendre, ajouta Léontine avec une pointe d’ironie.

L’Indien regardait furtivement, cette jolie dame entichée des choses anglaises, et semblait prendre plaisir à écouter le son de sa voix au diapason un peu trop élevé.