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l’affaire sougraine

dommage qu’il se soit mis à faire une pêche moins innocente. J’ai vu aussi cette jeune fille, Elmire Audet, dont l’enlèvement a fait tant de bruit ! et Clarisse Naptanne, la femme de Sougraine, une grande et grosse micmacque, laide, sale, hargneuse, toujours la pipe à la bouche, souvent le verre à la main… Et, comme ça, tu vas aller demeurer à Notre-Dame-des-Anges ?

— C’est M. Vilbertin qui me le conseille.

— Il ne faudrait pas tarder, ajouta Vilbertin, les bonnes paroisses sans médecin se font rares.

La conversation roula pendant quelque temps sur différents sujets, et le notaire, prétextant des affaires pressantes, reprit le chemin de son bureau. En s’en allant il songeait :

— Trente piastres de perdues… pour le moment, du moins, mais plus tard, on ne sait pas. Il est bon d’obliger des gens qui peuvent devenir vos juges ou vos accusateurs… Trente piastres… Dans tous les cas, on peut fort bien élever le prix des loyers, au printemps, et reprendre sur dix locataires ce que l’on donne à l’un d’eux. Vilbertin, tu n’es pas un sot… Et puis, il faut qu’il s’éloigne mon rival… mon rival ! C’est la première fois de ma vie que je prononce ce mot