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l’affaire sougraine

enfant,…… Hélas ! malheureux ! c’est pour moi-même qu’il eut fallu prier, c’est moi qui avais besoin du secours de la sainte Providence ! En reportant mes regards sur la terre autour de moi, je découvris, à quelques pas du ruisseau, sous un feuillage épais, le corps ensanglanté d’une femme. Un frisson parcourut mes membres, un horrible pressentiment me serra le cœur. Je me levai, je fis quelques pas. Ô Ciel ! ô douleur ! je reconnus ma pauvre femme !… Une pensée amère traversa mon esprit comme un dard traverse le cœur de l’ennemi vaincu : Les blancs que j’ai sauvés m’ont donc récompensé de mon dévouement en laissant lâchement massacrer la femme qui leur montrait le chemin du salut. J’étais injuste. Les cadavres de six traîtres sioux gisaient un peu plus loin.

— Merci, Visages pâles, mes amis, m’écriai-je, vous l’avez vengée !

Je me mis à chercher mon enfant. La nagane gisait près de l’eau. Les infâmes l’auraient-ils donc jetée dans le torrent, pensais-je ? Ont-ils eu honte de leur lâcheté ? Ont-ils voulu cacher leur ignominie en livrant au courant, pour qu’il l’emportât, le corps de l’innocente créature ? Mes recherches furent vaines ; je ne trouvai nulle part le petit ange que l’amour m’avait donné.