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FÊTES ET CORVÉES

tristes, parce qu’ils ont plus vécu, plus sensibles, parce qu’ils ont aimé davantage, plus sages, parce qu’ils ont éprouvé plus de déceptions, — versent, en ce jour, comme une rosée, la bénédiction sur la tête de leurs fils. Ils disent : « c’est le dernier jour de l’an que nous voyons ! » mais ils n’en croient rien, car, au fond du cœur, il y a toujours cette voix mystérieuse qui murmure : Espère ! Et puis, quand on a vécu quatre-vingts ans, on peut bien — ce me semble — vivre encore un peu. La grande affaire, c’est d’arriver à quatre-vingts.

Le jour de l’an n’est pas une de ces fêtes qui marquent, d’un trait distinctif, le peuple qui la chôme. C’est une réjouissance universelle, et qui est ancienne comme le premier calendrier — pas le Grégorien ! Il n’a que trois siècles, celui-là ! — Tout le monde est content et se réjouit de commencer une année ; quelques-uns, pour s’amender, beaucoup, pour faire comme auparavant ; les uns pour apprendre, les autres, pour oublier ; celui-ci, pour atteindre la fortune qui s’envole toujours, celui-là, pour arriver à la gloire qui lui sourit, et tous pour assouvir cette soif mystérieuse de félicité que Dieu a mise en nous,