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FANTÔME

et toute la nuit je restai couché sous le foin qui m’avait sauvé.

Le matin, quand les sauterelles et les criquets se mirent à voltiger au-dessus des brins de mil, ou à crier leurs rauques saluts au soleil levant, les Indiens avaient disparu, et je me trouvais seul au désert. J’appelai mes compagnons, mais nulle voix ne répondit à la mienne. Que sont-ils devenus ? Ont-ils été tués ? Sont-ils prisonniers ? Je l’ignore.

Deux fois les jours sombres et courts de l’automne s’étaient enfuis comme des volées de corbeaux, et deux fois l’hiver, de son écharpe de neige, avait enveloppé nos campagnes endormies. Noël avait chanté l’hosanna auprès de l’Enfant Dieu et le monde avait de nouveau tressailli d’allégresse au souvenir du plus consolant des mystères. Le carnaval avait encore secoué ses grelots éveillés au milieu de la foule distraite, puis le carême était venu mettre un peu de cendre sur la tête des chrétiens en leur murmurant d’une voix grave :