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Les propos éveillés, la danse et la musique
La rendaient plus pensive et plus mélancolique.
Elle croyait toujours ouir les grandes voix
De l’océan plaintif ou des immenses bois.
Elle sortit sans bruit. La nuit était charmante,
Le vent ne soufllait point, et la lune dormante
Semblait s’être arrêtée au bord de la forêt,
Et recouvrir les troncs d’un lumineux duvet.
A travers les rameaux, sur la calme rivière,
Tombait, de place en place, un réseau de lumière,
Comme tombe un penser d’espérance et d’amour
Dans l’esprit qui se trouble et qui se ferme au jour.
Chaque fleur autour d’elle, ouvrant son brillant vase,
Sa corolle d’argent, sa coupe de topaze,
Exhalait, vers le ciel, humblement et sans bruit,
Un suave parfum sur l’aile de la nuit :
Et c’était sa prière au puissant et bon Maitre
Qui veillait sur ses jours après l’avoir fait naître. Mais l’âme de la vierge élevait vers les cieux
Un arôme plus pur et plus délicieux
Que celui qu’épanchait la fleur de la prairie ;
Et moins qu’elle pourtant la fleur était flétrie !


Elle se dirigea vers le fond du jardin :
Combien d’émotions troublaient son chaste sein !
La lune qui noyait les bois, l’onde et le sable, Semblait, d’une langueur morne, indéfinissable
Noyer aussi son âme. Alors tout se taisait
Et dans l’immense plaine, au loin, tout reposait,