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SANG ET OR

Il y avait même de la haine. Ils auraient voulu voir la misère assiéger le seuil de leurs voisins, et les malheurs empoisonner leur existence.

Parfois cependant l’amertune se fondait tout à coup, et ils souriaient. Ils parlaient de richesse, ébauchaient des rêves séduisants, se promettaient une vieillesse fortunée.

On ne les aimait guère dans la paroisse. Babylas affichait du mépris pour tout ce qu’on respectait. Il ne prenait jamais le chemin de l’église. Il disait que le confessionnal est un écueil où périt la liberté de l’homme, s’effeuille l’amour de la femme ; que les prêtres font un métier lucratif et facile ; que la superstition bat son plein dans notre pays ; qu’il n’y a qu’une religion sensée, la croyance en un Dieu qui s’amuse de nos chimères… Un tas de bêtises enfin, qu’on ne se donnait pas la peine de réfuter. On levait les épaules, on tournait le dos.

Le peuple n’est pas savant, dis-je alors, mais il a du bon sens. Il juge vite et bien