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LE BAISER FATAL

Madame Graindamour ouvrit un placard et prit une chandelle enveloppée dans un papier blanc. C’était une chandelle bénite le jour de la Purification. Elle la fixa dans le chandelier de cuivre et l’alluma, pour éloigner le tonnerre.

On causait tranquillement, un peu terrifiés et pour chasser la peur, quand soudain la porte s’ouvrit et une voix cria :

— Célestin, ta grange brûle !… Le tonnerre !…

C’était Pierre Audet, le premier voisin, un de ceux qui étaient partis dix minutes auparavant.

Ma grange ! clama Célestin, bondissant de son siège.

Tout le monde s’élança dehors, sous la pluie et le tonnerre.

La grange brûlait. Une belle et longue grange, pleine de grain. Du blé, je ne sais combien de lourdes gerbes ! De l’avoine, la plus belle que le « javelier » eût jamais coupée ! Des pois aux gousses renflées ! De l’orge comme des grains d’or ! Et le seigle blanc comme la neige ! Et le