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LE BAISER FATAL

douloureusement ouverts, et sa poitrine se soulevait lentement sous l’émotion contenue. Et quand madame Graindamour lui dit : Tu aimes mon mari, je crois, elle répondit frémissante :

— L’amour, c’est le souffle du bon Dieu. S’embrasser, c’est…

Elle ne savait plus et elle cherchait.

— C’est se goûter, ajouta Célestin, en souriant. Et il s’approcha d’elle. L’infortunée comprit. Elle se leva d’un bond et lui jeta autour du cou ses bras durs comme des cercles d’acier.

Madame Graindamour éclata de rire.

— Te voilà bien enchaîné, dit-elle à son mari.

Lui, il était ému ; il était confus, car il se sentait devenir coupable. Il fit un léger effort pour rompre la chaîne troublante qui le retenait.

— Assez, Henriette, fit-il avec douceur, ma femme va se fâcher… Elle est jalouse.

— Ta femme, reprit la pauvre insensée, ta femme, c’est moi ! Est-ce que tu ne me