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LE RÉVEILLON

meilleur et plus joyeux. Quelque chose me disait que j’allais être témoin d’une grande merveille. De loin, de très loin, je voyais parfois étinceler le clocher de l’église, et le rayonnement se répercutait dans mon âme émue.

Enfin la Vigile arriva. Journée longue mais pleine de mouvement et de gaieté. Dans la maison, au hangar, dans la grange, tout s’agitait étrangement. En brûlant l’épinette résineuse, le poêle avait, tour à tour, des grondements de tonnerre et des crépitements de grêle. Tout chantait dans le grand fourneau plein de vapeurs : l’eau de la bouilloire, le jus de la viande et le bouillon de la soupe. À l’étable, les bœufs et les génisses oubliant de ruminer, et la tête haute, au-dessus du râtelier, traduisaient leur plaisir par des meuglements sonores que scandait un balancement de cornes. À la bergerie, les agneaux sautaient, bêlaient, folichonnaient, sans souci de leur toison blanche qui s’effrangeait, et des flocons légers qui