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MARIETTE

Le lendemain, Mariette alla au champ pour faner le foin nouveau. Le soleil rayonnait et donnait aux clôtures grises une apparence de cadre lumineux. Un large chapeau de paille protégeait contre les rayons trop chauds, sa jolie figure. Car elle était jolie, Mariette. Un mince fichu de mousseline se tordait négligemment sur sa gorge un peu brunie. Elle tenait une fourche de saule et jetait dans l’air pur les bribes perlées de la dernière chanson du village. De temps à autre, ses regards curieux se promenaient sur le pré voisin. Une pensée douce l’obsédait. Elle éprouvait les délices du réveil de l’amour, et trouvait à aimer un bonheur inexprimable.

Tout à coup elle aperçut un jeune faucheur courbé sur la prairie, et elle sentit son cœur se serrer et sa joue rougir. C’était lui. Quand elle fut plus près, elle vit, comme un serpent de feu, la faux luisante s’enfoncer dans l’herbe, et elle entendit, comme un chant d’amour, le cris-