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LE BŒUF DE MARGUERITE

Il existait donc, le diable, et il pouvait jouer de vrais tours aux hommes.

Elle allait toujours et tremblait en passant devant les touffes enflammées. Elle tremblait pour elle-même et pour son animal. Qui sait si le feu maudit n’allait pas les consumer l’un et l’autre ?

* * *

La plupart des convives s’étaient réunis à table, mais la gaieté avait perdu quelque chose de son éclat. Les femmes surtout, plus crédules et très portées vers le mystérieux, ne faisaient plus sonner, dans le concert rustique, leurs notes d’ordinaire si pittoresques et si charmantes.

Adèle Dubé, frappée d’une terreur singulière, se disait réellement ensorcelée, et son fiancé n’était pas loin de le croire, tant il avait peur de ne pas être heureux au moment fixé pour le bonheur. Madame Jonas Bernier aurait bien voulu que Marguerite ne fût pas venue ce soir-là, et elle se répandait en lamentations.