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LE BŒUF DE MARGUERITE

On se précipita dans les châssis et vers la porte.

Le blanc rideau de frimas qui voilait les fenêtres laissait passer des lueurs indécises et molles. Seuls les dessins capricieux de la gelée sur le verre, fougères et ramilles, brillaient d’un éclat vif, et paraissaient des bruyères en feu. Cependant les bouffées de chaudes haleines eurent vite fondu les jolis tableaux, et plus d’un œil curieux se colla sur les vitres froides. Quelques femmes reculèrent épouvantées.

— C’est le démon, disaient les unes.

— Il porte des cornes de feu ! remarquaient les autres.

— La colère de Marguerite va tomber sur moi, gémit Adèle Dubé… Je sens que je suis sa victime… Mes amours seront malheureuses !… Mon mariage ne se fera peut-être jamais !… Mon Dieu ! que va-t-il m’arriver ?

— Comme aux autres, va, prends courage, fit, d’une voix grave, la mère