dont je ne les loue pas, il faut savoir quel sera le remède à apporter aux millions de Juifs non émancipés. Je ne pense pas qu’il soit légitime de compter avec une transformation économique et sociale. D’abord cette transformation que je souhaite, et à laquelle j’aiderai autant que je le pourrai, me semble encore éloignée, hélas ! Il ne m’est pas prouvé ensuite, qu’elle amènerait pour les Juifs des conditions meilleures. Je crois qu’un jour l’humanité sera une confédération de groupements libres, et non organisés suivant le système capitaliste ; de groupements libres dans lesquels la distribution de la richesse et les relations du travail et du capital seront tout autres qu’elles sont aujourd’hui. Encore faut-il permettre à ces groupements de se constituer, de se former. Pourquoi les Juifs n’en formeraient-ils pas un ? Je ne vois rien qui s’y oppose et c’est dans le développement du nationalisme juif que je vois la solution de la question juive.
Si telle est votre conviction, me dira-t-on, pourquoi avez-vous combattu ici l’antisémitisme, pourquoi avez-vous engagé un combat dont vous savez ne pas sortir victorieux ? J’ai combattu et je combattrai encore l’antisémitisme, parce que j’estime que le devoir de tout être humain attaqué est de se défendre. L’individu qui renonce à résister et qui ne sait pas se servir des armes qu’il a à sa disposition, cet individu abdique sa personnalité, consent à l’esclavage et par conséquent mérite de disparaître. Il est bon de combattre l’antisémitisme, ne serait-ce que pour jouir des bénéfices de la paix armée et d’après le principe que les droits d’un belligérants sont plutôt reconnus que ceux d’un serf qui se soumet. Le juif qui ne se lève pas devant l’antisémitisme, s’enfonce d’un degré dans l’abjection morale.
Ceci dit, il faut que j’examine quel avantage apporterait aux Juifs une constitution en nation et enfin, comment le nationalisme que je viens de préconiser peut s’accorder avec les idées socialistes qui ont été, sont et resteront mes idées ? Quant aux moyens, par lesquels on créera définitivement cette nation juive, je n’ai pas à m’en occuper pour le moment.
Comment doit-on considérer le nationalisme ? Il est pour moi : l’expression de la liberté collective et la condition de la liberté individuelle. J’appelle nation, le milieu dans lequel l’individu peut se développer et s’épanouir d’une façon parfaite. Justifions ces définitions.
S’il est une chose indéniable, c’est l’existence entre un certain nombre d’être humains, d’affinités spéciales. Quelles que soient les raisons et les causes qui ont fait