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que le souverain avait mises à la liberté religieuse des païens et des Juifs, il avait été obligé à de certains ménagements ; les adorateurs des Dieux étaient nombreux encore sous son règne, et il n’osait pas provoquer des émeutes dangereuses. Les Juifs bénéficièrent, jusqu’à un certain point de ces hésitations. Avec Constance tout changea. Constantin, baptisé seulement au lit de mort par Eusèbe de Nicomédie, avait été un politique et un sceptique qui s’était servi du christianisme comme d’un instrument ; Constance fut un orthodoxe, un orthodoxe intolérant et fanatique comme le clergé et les moines de son temps. Avec lui, l’Église devint dominatrice, et son pouvoir s’exerça dès lors, en grande partie, par la vengeance, elle eut à cœur, semble-t-il, de faire chèrement payer à ses persécuteurs d’antan tout ce qu’elle avait souffert. Sitôt armée, elle oublia ses plus élémentaires principes, et elle dirigea contre ses adversaires le bras séculier. Les païens et les Juifs furent poursuivis avec la plus dure âpreté ; ceux qui sacrifiaient à Zeus comme ceux qui adoraient Jehovah se virent maltraités, et l’antijudaïsme marcha de concert avec l’antipaganisme.

Les docteurs juifs de Judée furent exilés, on les menaça de mort s’ils persistaient à donner leur enseignement, on les obligea à abandonner Tibériade, et même à fuir la Palestine, tandis que dans toutes les provinces de l’Empire on leur déniait leurs droits de citoyens romains. Aux lois, s’ajoutèrent des tracasseries nombreuses. Pendant le séjour en Judée des