Page:Lazare - L’Antisémitisme, 1894.djvu/82

Cette page a été validée par deux contributeurs.

christianisme n’eut plus besoin d’apologètes : César était désormais convaincu et Cyrille d’Alexandrie qui écrivait un ouvrage contre Julien l’Apostat fut le dernier des apologètes. Quant à Israël, si l’on persista, jusqu’à nos jours même, à lui montrer son entêtement, on le fit d’une façon moins insidieuse et moins persuasive, on lui parla en maître, et dès le milieu du cinquième siècle, les apologies proprement dites cessent pour ne reparaître que plus tard transformées et modifiées.

On n’essaya plus uniquement de ramener les Juifs au Christ ; d’ailleurs, quelques années d’efforts avaient pu montrer aux théologiens la vanité de leur œuvre et combien peu leurs raisonnements, basés le plus souvent sur une exégèse fantaisiste ou quelques contresens de la traduction alexandrine de la Bible, persuadaient ces endurcis qui écoutaient plutôt leurs docteurs, et tenaient davantage à leur foi à mesure qu’elle était plus honnie. Aux arguments, on mêla les insultes, on vit moins dans le juif le chrétien possible que le déicide sans remords ; on injuria ces hommes dont la persistance choquait et qui, par leur unique présence, empêchaient le triomphe de l’Église d’être complet. On s’efforça d’oublier l’origine judaïque de Jésus, celle des apôtres, et que c’était à l’ombre de la synagogue que le christianisme avait grandi, et cet oubli s’est perpétué, et maintenant encore, dans la chrétienté tout entière, qui donc voudrait reconnaître qu’il se courbe devant un pauvre Juif et une humble Juive de Galilée ?