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L'ANTISÉMITISME

prosélytisme, qui entravait la propagation de la doctrine stoïcienne. Aussi exhale-t-il sa colère : « Les Romains, dit-il avec tristesse, ont adopté le sabbat[1]. » Et parlant des Juifs : « Cette abominable nation, conclut-il, est parvenue à répandre ses usages dans le monde entier ; les vaincus ont donné des lois aux vainqueurs[2]. »

La République et l’Empire pensèrent, comme Sénèque : l’une et l’autre, à plusieurs reprises, prirent des mesures pour arrêter le prosélytisme juif. En l’an 22, un sénatus-consulte fut rendu, sous Tibère contre les superstitions égyptiennes et judaïques ; et quatre mille Juifs, nous dit Tacite, furent transportés en Sardaigne. Caligula leur infligea des vexations ; il encouragea les agissements de Flaccus en Égypte, et Flaccus, soutenu par l’Empereur, enleva aux Juifs les privilèges que leur avait accordés César ; il leur ravit leur synagogue et décréta qu’on les pouvait traiter comme les habitants d’une ville prise. Domitien frappa d’un impôt les Juifs et ceux qui menaient une vie judaïque, espérant par l’application d’une taxe arrêter les conversions, et Antonin le Pieux interdit aux Juifs de circoncire d’autres que leurs fils.

Et l’antijudaïsme ne se manifesta pas seulement à Rome et à Alexandrie ; partout où il y eut des Juifs on le vit se produire : à Antioche, où on en fit de grands massacres ; dans la Lybie pentapolitaine, où, sous Vespasien, le gouverneur Catullus excita la po-

  1. Epître XCV.
  2. De la Superstition, Fragm. XXXVI.