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antisémitisme. Il sait que la spéculation effrénée et que les krachs successifs l’ont ruiné, et pour lui encore les plus terribles accapareurs du capital financier et agioteur sont les Juifs, ce qui est d’ailleurs fort exact. Ceux-là mêmes dont la ruine n’est pas venue de la participation à des spéculations dans lesquelles ils auraient été vaincus attribuent quand même leur décadence à l’agio qui a éliminé une grande partie du capital commercial et du capital industriel. Seulement, comme toujours, ils rendent le Juif responsable d’un état de choses dont il est loin d’être l’unique cause.

Quant à l’autre forme de l’antisémitisme économique, elle est plus simple : elle est provoquée par la concurrence directe entre les manieurs d’argent, les commerçants et les industriels juifs et chrétiens. Les capitalistes chrétiens, isolés généralement, se trouvent en face des capitalistes Juifs unis, sinon associés, dans un état de manifeste infériorité, et dans le combat journalier ils sont très fréquemment vaincus par eux. Ils ont donc à souffrir directement du développement de l’industrie et du grand commerce juif, de là, chez eux, une animosité extrême et le désir de réduire la puissance de leurs rivaux heureux. C’est la manifestation la plus violente de l’antisémitisme, la plus âpre, la plus rude, parce qu’elle est l’expression de la défense des intérêts immédiats et égoïstes.

On pourrait voir aussi un signe de l’antisémitisme par suite de la concurrence immédiate et directe, dans les manifestations ouvrières contre les Juifs de