Page:Lazare - L’Antisémitisme, 1894.djvu/362

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ils publient leurs journaux de propagande en cet idiome et ils les impriment en caractères hébraïques[1]. L’on objectera que chassés de leur patrie et arrivant en un pays dont ils ignoraient la langue, ils ont été obligés de s’unir et qu’ils continuaient tout naturellement à se servir de l’hébraco-germain qui leur était familier ; cette objection est très juste, mais il faut observer qu’en d’autres contrées, ainsi en Hollande, en Galicie, les Juifs ouvriers nationaux forment aussi des associations spéciales[2].

Donc le Juif prend part à la révolution et il y prend part en tant que juif, c’est-à-dire tout en restant juif. Est-ce pour cela que les conservateurs chrétiens sont antisémites, et cette aptitude révolutionnaire des Juifs est-elle une cause d’antisémitisme ? Disons d’abord que la majorité des conservateurs ignore cette action historique et idéologique du Juif ; elle n’est connue, et encore très approximativement, que des théoriciens et des littérateurs antisémites. Aussi l’animosité contre Israël ne vient pas de ce qu’il a aidé à préparer la Terreur, ni de ce que Manin a délivré Venise et Marx organisé l’Internationale. L’antisémite —

  1. A Londres se publie un de ces journaux : Der Arbeiter Freund, à New York il s’en publie deux dont l’un quotidien : Die Arbeiter Zeitung, et un hebdomadaire : Freie Arbeiter Stimme ; paraît en outre une revue mensuelle, Die Zukunft. Ces journaux et revues sont soit socialistes, soit communistes-anarchistes.
  2. Les socialistes juifs de Hollande publient un journal dont le titre est : Ons Blad, organe des socialistes israélites. Les ouvriers socialistes juifs de Galicie publient à Lemberg un journal en caractères hébraïques et en jargon hébraeo-germain : La Vérité.