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est un agent de révolution. Toutefois le grief se complique, car l’antisémitisme accuse les Juifs d’être la cause des révolutions. Examinons ce que vaut cette accusation.

Tel qu’il était, avec ses dispositions, avec ses tendances, il était inévitable que le Juif jouât un rôle dans les révolutions : il l’a joué. Dire, avec la plupart des adversaires d’Israël, que toute perturbation, toute révolte, tout bouleversement vient du Juif, a été causé, provoqué par le Juif et que si les gouvernements changent et se transforment, c’est parce que le Juif a préparé ces changements et ces transformations dans ses conseils mystérieux, cela est excessif. Affirmer une telle chose, c’est méconnaître les plus élémentaires des lois historiques, c’est attribuer à un élément infime une part injustifiée, c’est ne voir qu’une des plus minimes faces de l’histoire tout en en négligeant les mille côtés. Le dernier Juif fût mort en défendant les remparts de Sion, que la destinée des sociétés n’eût pas été changée ; dans cette prodigieuse résultante qui est le progrès, la composante juive eût pu manquer, l’état social eût évolué quand même ; d’autres facteurs eussent remplacé le facteur juif et accompli son œuvre économique. La Bible restant et le christianisme aussi, l’œuvre intellectuelle et morale du Juif se fût faite sans lui. Le Juif n’est donc pas le moteur du monde, l’hélice grâce à laquelle nous marchons vers une rénovation ; toutefois ceux qui, par prudence, nous le montrent comme étant sans impor-