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postérieurs ; après que Iahvé avait clos leurs paupières, ils n’attendaient plus que l’horreur du Schéol. Aussi l’important pour eux était la vie ; ils cherchaient à l’embellir de tous les bonheurs, et ces forcenés idéalistes, qui conçurent la pure idée du Dieu un, furent, par un saisissant et explicable contraste, les plus intraitables des sensualistes. Iahvé leur avait assigné sur la terre un certain nombre d’années ; il leur demandait, pendant cette existence, trop courte toujours au gré de l’Hébreu, un culte fidèle et scrupuleux ; en retour, l’Hébreu réclamait de son Seigneur des avantages positifs.

C’est l’idée de contrat qui domina toute la théologie d’Israël. Quand l’Israélite remplissait ses engagements vis-à-vis de Iahvé, il exigeait la réciprocité. S’il se croyait lésé, s’il jugeait que ses droits n’étaient pas respectés, il n’avait aucune bonne raison de temporiser, car la minute de bonheur qu’il perdait était une minute qu’on lui volait, et que jamais on ne pourrait lui rendre. Aussi tenait-il à l’exécution intégrale des réciproques obligations ; il voulait qu’entre lui et son Dieu fussent placées des balances justes ; il tenait une exacte comptabilité de ses devoirs et de ses droits, cette comptabilité était une part de la religion, et Spinoza a pu justement dire[1] : « Les dogmes de la religion chez les Hébreux n’étaient pas des enseignements, mais des droits et

  1. Traité théolog. polit., ch. XVII.