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c’est parce qu’ils furent toujours des mécontents.

Je ne veux pas prétendre par là qu’ils aient été simplement des frondeurs ou des opposants systématiques à tout gouvernement — car ils n’étaient pas uniquement irrités contre un Ahab ou un Ahazia — mais l’état des choses ne les satisfaisait pas ; ils étaient perpétuellement inquiets en l’attente d’un mieux qu’ils ne trouvaient jamais réalisé. Leur idéal n’étant pas de ceux qui se contentent d’espérance — ils ne l’avaient pas placé assez haut pour cela — ils ne pouvaient guère endormir leurs ambitions par des rêves et des fantômes. Ils se croyaient en droit de demander des satisfactions immédiates et non des promesses lointaines. De là cette agitation constante des Juifs, qui se manifesta non seulement dans le prophétisme, dans le messianisme et dans le christianisme, qui en fut le suprême aboutissement, mais encore depuis la dispersion et alors d’une façon individuelle.

Les causes qui firent naître cette agitation, qui l’entretinrent et la perpétuèrent dans l’âme de quelques Juifs modernes, ne sont pas des causes extérieures, telles que la tyrannie effective d’un prince, d’un peuple, ou d’un code farouche ; ce sont des causes internes, c’est-à-dire qui tiennent à l’essence même de l’esprit hébraïque. A l’idée que les Israélites se faisaient de Dieu, à leur conception de la vie et de la mort, il faut demander les raisons des sentiments de révolte dont ils furent animés.

Pour Israël, la vie est un bienfait, l’existence que Dieu a donnée à l’homme est bonne ; vivre est en