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sa dispersion ; grâce à lui, des individus d’origines diverses avaient constitué un peuple ; il avait été le moule de l’âme juive, le créateur de la race ; lui et les lois restrictives des sociétés avaient modelé le Juif. Les législations abolies, le Talmud dédaigné, il semble que la nation juive ait dû inévitablement mourir, et cependant les Juifs occidentaux sont encore des Juifs. Ils sont des Juifs, parce qu’ils ont gardé vivace et vivante leur conscience nationale ; ils croient toujours qu’ils sont une nation, et croyant cela, ils se conservent. Quand le Juif cesse d’avoir la conscience de sa nationalité, il disparaît ; tant qu’il a cette conscience, il permane. Il n’a plus de foi religieuse, il ne pratique plus, il est irréligieux, il est quelquefois athée, mais il permane parce qu’il a la croyance à sa race. Il a gardé son orgueil national, il s’imagine toujours être une individualité supérieure, un être différent de ceux qui l’entourent, et cette conviction l’empêche de s’assimiler, car, étant toujours exclusif, il refuse en général de se mêler par le mariage aux peuples qui l’entourent. Le moderne judaïsme prétend n’être plus qu’une confession religieuse ; mais il est encore en réalité un ethnos, puisqu’il croit l’être, puisqu’il a gardé ses préjugés, son égoïsme, et sa vanité de peuple, croyance, préjugés, égoïsme et vanité qui le font apparaître comme étranger aux peuples dans le sein desquels il subsiste, et ici nous touchons à une des causes les plus profondes de l’antisémitisme. L’antisémitisme est une des façons