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rieure ; il attache à sa noblesse, à son antiquité la plus haute importance et maintenant encore, il est en proie à l’orgueil patriotique. Bien qu’il ne soit plus un peuple, bien qu’il proteste contre ceux qui veulent voir en lui le représentant d’une nation campée parmi des nations étrangères, il n’en garde pas moins au fond de lui-même cette vaniteuse persuasion et, ainsi, il est semblable aux chauvins de tous les pays. Comme eux, il se prétend d’origine pure, sans que son affirmation soit mieux étayée, et il nous faut examiner de près l’assertion des ennemis d’Israël et d’Israël lui-même : à savoir que les Juifs sont le peuple le plus un, le plus stable, le plus impénétrable, le plus irréductible.

Les documents nous manquent pour déterminer l’ethnologie des Bené-Israël nomades, mais il est probable que les douze tribus qui, selon les traditions, composaient ce peuple, n’appartenaient pas à une souche unique ; c’étaient sans doute des tribus hétérogènes car, pas plus que les autres nations, la nation juive ne peut se vanter, en dépit de ses légendes, d’avoir été engendrée par un couple unique, et la conception courante qui représente la tribu hébraïque se divisant en sous-tribus[1] n’est qu’une conception légendaire et traditionnelle, celle de la Genèse qu’ont acceptée, à tort, une partie des historiens des Hébreux. Déjà composés d’unités diverses, parmi lesquelles étaient sans doute des groupes tou-

  1. Ernest Renan : Histoire du peuple d’Israël, t I.