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épurèrent, mais le peuple grec n’en fut pas moins un amalgame de races bien diverses, aryennes, touraniennes et sémitiques, peut-être chamites, et c’est à d’autres causes qu’à la noblesse et à la pureté de son origine qu’il dut son génie.

Cependant, les antisémites modernes admettraient à la rigueur l’importance du sémitisme dans l’histoire de la civilisation, en faisant, là encore, une classification. Il y a, disent-ils, des sémites supérieurs et des sémites inférieurs. Le Juif est le dernier des sémites, celui qui est improductif par essence, celui dont les hommes n’ont rien reçu et qui ne peut rien donner. Il est impossible d’accepter cette assertion. Il est vrai que la nation israélite n’a jamais manifesté de grandes aptitudes pour les arts plastiques, mais elle a accompli par la voix de ses prophètes une œuvre morale dont tout peuple a bénéficié : elle a élaboré quelques-unes des idées éthiques et sociales, qui sont le ferment de l’humanité ; si elle n’a pas eu des sculpteurs et des peintres divins, elle a eu de merveilleux poètes, elle a eu surtout des moralistes qui ont travaillé pour la fraternité universelle, des pamphlétaires vaticinateurs qui ont rendu vivante et immortelle la notion de la justice, et Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, malgré leur violence, leur férocité même, ont fait entendre la grande voix de la souffrance qui veut non seulement être protégée contre la force abominable, mais encore être délivrée.

Du reste, si l’élément phénicien s’incorpora à l’élément pélasgique et hellène, à l’élément latin, à l’élé-