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L'ANTIJUDAÏSME LÉGAL MODERNE

certaines municipalités : dans d’autres villages, au contraire, les Juifs étaient tolérés. Cet état de choses dura jusqu’en 1867. À cette époque, le ministre Jean Bratianio publia une circulaire dans laquelle il rappelait que les Juifs n’avaient pas le droit de demeurer dans les communes rurales, ni d’y affermer des propriétés. A la suite de cette circulaire, des Juifs furent expulsés des villages qu’ils habitaient, on les condamna comme vagabonds et les expulsions se succédèrent jusqu’en 1877 ; elles étaient généralement provoquées par des émeutes à Bucharest, à Jassy, à Galatz, à Tecuciu, dans d’autres lieux encore, émeutes pendant lesquelles on profanait les cimetières et on brûlait les synagogues.

Quelles étaient, quelles sont encore les causes de cette législation spéciale, et de cette animosité des Roumains contre les Juifs ? Elles ne sont pas uniquement religieuses et ce n’est point, malgré la persistance des ataviques préjugés, d’une guerre confessionnelle qu’il s’agit. Les Juifs roumains, au moment de la formation de la Roumanie surtout, formaient dans les pays moldo-valaques, des agglomérations complètement séparées du gros de la population[1]. Ils portaient un costume spécial, habitaient dans des quartiers réservés, pour échapper aux souillures, et par-

  1. Cet état ne s’est guère modifié depuis, et c’est une minorité de Juifs qui par l’accès dans les universités et le développement intellectuel qui en est résulté, a pu échapper aux préjugés exclusivistes de la masse, qui est toujours plongée dans un abrutissement dont seule l’instruction antitalmudique pourrait la tirer.