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monstration théologique, mais ils préféraient souvent l’invention et même la calomnie ; parfois ils alliaient les deux choses, tel Alphonse de Valladolid (Abner de Burgos) qui publia à la fois des concordances de la loi et des traités d’âpre polémique : le Livre des batailles de Dieu et le Miroir de justice[1].

Mais le grand adversaire des convertis, celui qui devait supporter le plus fort de leur colère, c’était le Talmud. Ils le dénonçaient constamment aux inquisiteurs, au roi, à l’empereur, au pape. Le Talmud était le livre abominable, le réceptacle des plus affreuses injures contre Jésus, la Trinité et les chrétiens ; contre lui Pedro de la Caballeria écrivait sa « Colère du Christ contre les Juifs »[2], Pfefferkorn son Ennemi des Juifs[3], dans lequel il se félicitait de s’être « retiré du sale et pestiféré bourbier des Juifs », et Jérôme de Santa-Fé son Hebreomastyx[4]. Les théologiens catholiques suivaient l’exemple des convertis, le plus souvent même ils n’avaient sur le Talmud que les notions que les convertis leur donnaient.

Les autodafés suivaient communément ces dénonciations du Talmud, mais ils étaient ordinairement précédés d’une controverse. Cette coutume des controverses remonte à une très haute antiquité. Nous savons que déjà les docteurs juifs discutèrent avec

  1. Bibliothèque nationale, manuscrit du fonds espagnol, no 43. Voir Isidore Loeb, Revue des Études juives, t. XVIII.
  2. Tractatus Zellus christi contra Judæos, Sarracenos et infideles (Venise, 1542).
  3. Hosti Judoeorum, Cologne 1509.
  4. Hebreomastyx (Francfort, 1601).