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naissance des écrits hébraïques et arabes que par celle des œuvres latines »[1]. Ces libelles portent des titres assez caractéristiques : Capistrum Judaeorum (Muselière des Juifs) et Pugio Fidei (Poignard de la Foi)[2]). Le second fut le plus répandu. « Il est bon, y disait Raymond Martin, que les chrétiens prennent en main le glaive de leurs ennemis les Juifs pour les en frapper avec. » Partant de là, et de cette idée très répandue que Dieu a donné à Moïse une loi orale, commentaire de la loi écrite, et contenant la révélation de la Trinité et de la divinité de Jésus, Martin prouvait, par les textes bibliques, talmudiques et kabbalistiques que le Messie était venu et que les dogmes du catholicisme étaient irréfutables. En même temps, dans deux chapitres[3], il s’attaquait au judaïsme qu’il présentait comme réprouvé et abominable.

Le Pugio Fidei fut fort en vogue pendant le treizième et le quatorzième siècles parmi les moines, surtout parmi les dominicains, ardents défenseurs de la foi. On l’étudia, on le consulta, et on le plagia. Le nombre des écrits qu’inspira Raymond Martin, et auxquels le Pugio Fidei servit de prototype et même de moule, fut considérable. On peut citer entre

  1. Augustin Giustiniani : Linguæ Hebræ (1566).
  2. Pugio Fidei (Paris, 1651) (voir Quétif : Bibl. scriptorum dommicarum t. I, et l’édition de Carpzon, Leipzig, 1637).
  3. Chap. XXI et XXII : de Reprobatione et Fætore doctrinæ Judæorum.