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les hantaient, ils attendaient le Messie avec une confiance chaque jour renouvelée, et jamais les faux Messies ne furent accueillis avec autant d’enthousiasme qu’au dix-septième et au dix-huitième siècle. Les kabbalistes épuisaient les combinaisons arithmétiques pour calculer la date exacte de la venue de celui qui était si désiré. Vers 1666, époque que l’on avait le plus généralement indiquée comme l’époque sacrée, tous les Juifs d’Orient furent soulevés par les prédications de Zabbataï Zévi. De Smyrne, où Zabbataï avait proclamé sa messianité, le mouvement se propagea en Hollande, et même en Angleterre, et chacun attendit de ce roi des rois, ainsi appelait-on Zabbatai, la restauration de Jérusalem et du royaume saint. Le même enthousiasme se manifesta en 1755, lorsque Frank se présenta en Podolie comme le nouveau Messie. Autour de tous ces illuminés, de nombreuses sectes mystiques se formèrent : celles des Donmeh, qui se rattachait aux musulmans, celle des Hassidims, des néo-Hassidims et celle des Trinitaires qui se rapprochait du christianisme en professant le dogme du Dieu un et triple[1].

Ces espoirs qu’entretenait l’illuminisme des kabbalistes contribuaient à retenir les Juifs à l’écart, mais ceux qui n’étaient pas séduits par les spéculations des rêveurs se courbaient sous le joug du Talmud, joug plus rude encore, plus avilissant en tous cas. Depuis le seizième siècle, loin de diminuer, la tyrannie talmudique s’était accrue. À cette époque

  1. Peter Beer : Le Judaïsme et ses sectes.